Maîtriser la macrophotographie inversée

par Adrien Coquelle
Je vous avais parlé dans un précédent article de la macrophotographie inversée, c’est à dire à l’aide d’un objectif monté à l’envers sur votre boîtier. Très accessible, cette technique que j’ai moi-même adoptée à mes tout débuts (avant d’avoir un vrai objectif macro), permet de s’essayer rapidement aux joies de la macro pour un coût très faible. Aujourd’hui, je vais entrer plus en détails dans cette technique, et je vais tenter de vous expliquer de manière plus concrète pourquoi elle reste une de mes préférées, et pourquoi je continue à l’utiliser alors même que je dispose dorénavant d’un vrai objectif macro qui m’a coûté (très) cher…

bague inversion 3 Photo animalière

Mise en place

 
Vous venez d’acquérir votre première bague d’inversion ? Parfait, montez-la et prenez une photo ! Un souci ? Et oui, vous voilà directement confronté au problème majeur de la macro inversée : on perd tous les automatismes… Alors que l’auto-focus n’est pas indispensable en macro (99,99% des macroistes bossent en focus manuel, on en reparlera…), comment faire pour gérer l’ouverture du diaphragme, surtout lorsque l’on sait qu’à de tels rapports, la pleine ouverture réduit considérablement la profondeur de champ ?
Pour les possesseur de boîtiers Canon (heureux soyez-vous, le royaume des cieux est à vous !), il existe une astuce très pratique qui permet de garder le diaphragme fermé à la valeur souhaitée :
  • Montez votre objectif dans le bon sens
  • Mettez-vous en mode manuel et choisissez l’ouverture souhaitée 
  • Appuyez sur le bouton de test de profondeur de champ. Ce bouton, très discret, se trouve à l’avant du boîtier à proximité de l’objectif et permet de simuler la profondeur de champ réelle à la prise de vue
  • Tout en maintenant ce bouton appuyé, retirez l’objectif et vous constaterez que le diaphragme reste fermé à la valeur souhaitée

 

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Bouton de test de profondeur de champ sur un Canon 7D
Cette manipulation est un peu laborieuse au début, mais on prend rapidement le coup de main ! Si le diaphragme s’ouvre instantanément au moment où vous débranchez l’objectif, recommencez la manipulation du début, vous n’avez juste probablement pas gardé le bouton de test enfoncé assez longtemps.
A noter que certains objectifs dits “mécaniques” possèdent un petit levier au niveau des connectiques pour fermer manuellement le diaphragme, mais étant très fragile, nous ne conseillons pas de le manipuler ! Pour les Nikonistes et autres marques…désolé, il n’existe pas de technique de ce genre à ma connaissance (puis de toute façon il fallait être chez Canon !! #TrollActivé).

Des rapports supérieurs au 1:1

 
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Crayon de couleur photographié au 35 mm inversé (gauche) puis au 18 mm inversé (droite).
À moins d’avoir les moyens de vous payer le MP-E 65mm de chez Canon (900€ en moyenne tout de même…), il n’existe à ce jour aucun objectif pouvant dépasser le rapport 1:1 ! Si vous vous sentez frustré de ne pas pouvoir admirer plus en détails la pilosité d’une fourmi, alors la macro inversée est faite pour vous ! Comme nous l’avions vu dans l’article précédent, plus la focale utilisée est courte et plus le facteur de grandissement sera grand une fois montée à l’envers. Voici par exemple une photo de guêpe prise avec mon Sigma 18-35mm inversé. Les détails sur sa tête sont très nombreux, et je n’aurais jamais pu obtenir un tel résultat avec mon 100mm macro qui ne peut aller qu’à un rapport de 1:1.

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Une créativité accrue

LE point principal qui fait que j’adore la macro inversée ! Agathe et moi aimons les photos où le sujet se retrouve plongé dans un flou artistique très prononcé. N’ayant pas une démarche naturaliste, je ne cherche absolument pas à avoir la netteté la plus parfaite sur tel ou tel insecte, mais recherche plutôt des ambiances et des lumières particulières.

fleur 3 1 1 Photo animalière

Ce flou, appelé bokeh, est d’autant plus prononcé que l’ouverture du diaphragme est grand. Ne dépassant pas f/2.8 sur tous les objectifs macro actuels, imaginez les nouvelles possibilités qui s’ouvrent à vous avec des objectifs à 1.8 ou plus… Nous allons voir cela plus en détails avec un…

Cas pratique: le Canon EF 50 mm f/1.4 USM

Je l’avais déjà mentionné dans mon précédent article, mais la focale 50 mm est très souvent considérée comme étant la meilleure pour pratiquer la macro inversée. La principale raison souvent citée est qu’elle permet de s’approcher le plus du rapport 1:1, et donc de faire de la vraie macro au sens strict du terme. Mais, dans mon cas personnel, ma préférence pour cette optique, et plus particulièrement du 50 mm f/1.4 de chez Canon, est également due à plusieurs autres raisons :
  • Une focale fixe
  • Une légèreté de mouvement
  • Un objectif très lumineux
  • Un bokeh doux et extrême

1/ Focale fixe

Tous les sites spécialisés et photographes vous le diront, travailler avec une focale fixe est la meilleure façon de progresser et de développer un vrai sens artistique. En macro c’est également le cas ! Ici pas d’excuses, il va falloir tourner autour de votre sujet, vous approcher suffisamment pour trouver le meilleur angle qui rendra hommage à votre sujet. La première fois que j’ai mis l’œil dans mon 50 mm inversé, j’ai été terriblement surpris et handicapé… C’est bien simple, je trouvais qu’il fallait énormément s’approcher du sujet pour l’avoir dans la zone de netteté, tout était flou, je ne trouvais pas les bons cadrages, je ne comprenais pas comment cela fonctionnait… Agathe peut vous le dire, au début j’étais assez découragé, je n’obtenais absolument pas ce que je voulais, sans comprendre pourquoi !
Mais à force de pratique et après de longues heures de frustration, j’ai enfin réussi à maîtriser cette technique. Les premiers “bons” clichés sont arrivés, et aujourd’hui et je ne regrette absolument pas mes efforts. J’ai la conviction que d’avoir persisté dans cette technique m’a permis de développer un œil et que de me retrouver confronté directement aux contraintes de la macro m’a fait progresser beaucoup plus rapidement.
Pour l’anecdote, en macro inversée la distance de mise au point est ridiculement petite…n’essayez pas de prendre une photo d’un bourdon à cette distance, c’est assez…sportif pour les nerfs ! ^^
fleur 2 1 Photo animalière

2/ Légèreté de mouvement

290 grammes ! Qui dit mieux ? Le 50 mm est vraiment une focale très légère et hyper pratique, un régal à utiliser… Avec elle pas besoin de sac photo, montez-le sur votre boîtier, et en avant ! De plus, j’aime particulièrement lors de mes balades macro-inversée, avoir la possibilité de remettre le 50 mm en position normale en quelques secondes, et photographier un sujet imprévu qui passe par-là. Car oui, le 50 mm reste la focale à tout faire (portraits, street-photographie, etc…), ne l’oublions pas !

3/ Un objectif lumineux

F/1.4…Tout est dit ! Avec une telle ouverture je peux couvrir plusieurs situations, que le temps soit nuageux, brumeux, qu’il commence à faire nuit ou que je sois en intérieur ! Ajoutez à cela la possibilité de pouvoir augmenter la vitesse d’obturation, et vous obtenez un objectif capable de figer le mouvement des insectes les plus rapides.
insecte 1 Photo animalière
 

4/ Un bokeh doux et extrême

F/1.4…Quoi ? Encore besoin de le répéter ?!
Déjà magnifique en position normale, le bokeh, grâce à ses 8 lamelles, devient monstrueusement beau en inversé avec cette optique ! C’est bien simple, à une telle ouverture, les couleurs sont tout simplement diluées, noyées les unes dans les autres, on s’approche même parfois de la peinture tant le rendu est très particulier. Alors on vous l’accorde en macro la profondeur de champ étant déjà minuscule, il devient rapidement très difficile d’avoir son sujet net à un telle ouverture… Mais le rendu est tellement atypique, que ça vaut le coût de rater quelques photos en plus pour avoir enfin LA photo !

fleur PN 1 Photo animalière

  • A pleine ouverture le nombre de lamelle ne compte pas. C’est quand on ferme un peu, par exemple pour augmenter le profondeur de champ, que le nombre de lamelle agit sur le rendu.

  • Merci Mr. Adrien d’avoir pris le temps de partager votre expérience avec nous. Votre article est tombé pile dans mon cas. Ma femme avait renoncée à la macro et suite à votre article elle est présentement dehors en ce moment à pratiquer son art. Je vous souhaite bien du plaisir photographique cet été.

    Mark

  • Bonjour Adrien,
    Je viens de recevoir aujourd’hui meme ma bague d’inversion pour numeriser mes diapos en macro.
    Je possede (cadeau de mon fils), un boitier Nikon D7100 ainsi qu’un objectif Sigma 18-35 comme vous.
    J’ai donc inversé l’objectif et la surprise : dans l’objectif je ne vois qu’une partie de la diapo 1/3 environ.
    Si je recule le boitier pour la voire en entier, je n’arrive pas à rattrapper le flou(diapo dans une boite a chaussure avec un bon eclairage derriere).
    Je compter renvoyer la bague demain, mais je viens de tomber sur votre site.
    Y a t-il une solution technique pour remedier à cela ? ou bien cela n’est pas realisable !
    Merci d’avoir la gentillesse de me répondre.
    Bien cordialement,
    Christian,

    • Bonjour Christian,

      Quand on retourne un objectif, on “zoom” très fort et donc on se retrouve très près du sujet, du coup la profondeur de champ est toute petite.

      Je pense que vous êtes limité par la distance de mise au point et la profondeur de champ malheureusement.

      Essayez de contacter ce blogueur qui est spécialisé dans ce genre de montages, peut-être aura-t-il une solution pour vous : http://macromicrophoto.fr/dotcl/index.php?

      Merci et à bientôt

      • Merci beaucoup Adrien pour avoir pris le temps de me répondre,
        Je vais y jeter un oeil.
        Belles photos sur votre site.
        A bientot,
        Bien cordialement,
        Christian

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